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Traitement orthodontique en deux phases

Traitement orthodontique en deux phases

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Le « timing » du traitement : une controverse

posez des questions à votre orthodontisteUn des sujets les plus controversés en orthodontie est celui du moment idéal pour entreprendre un traitement d’orthodontie pour les divers problèmes rencontrés chez les patients en croissance. Le plus souvent, la principale préoccupation est le bénéfice du traitement à un stade précoce de dentition mixte en comparaison avec un autre traitement qui serait commencé à la fin du stade de dentition mixte ou dans la dentition permanente. Une des raisons pour cette controverse est que le «coût» pour un traitement précoce n’est qu’une partie d’un protocole à deux phases. La phase 1 implique généralement de 6 à 12 mois de traitement actif avec l’intention de changer les relations dento-squeletttiques entre les mâchoires et la phase 2 est le processus « de finition » après l’éruption des dents permanentes. Ainsi, l’analyse risques vs bénéfices devient inévitable. Est-ce que les avantages d’une intervention précoce justifient le coût et la durée d’un traitement à deux phases? Quelques études « classiques » en orthodontie ont tenté de répondre à ces questions et certaines seront décrites ci-après.

Peut-on faire croître une mandibule en orthodontie?

Comparaison de la croissance mandibulaire normale, d’une accélération de croissance temporaire à l’aide d’un traitement orthodontique et d’une stimulation théorique de la croissance mandibulaire.

Lorsqu’une malocclusion comporte une rétrognathie mandibulaire comme dans les Classe II (mandibule courte, menton fuyant, écart horizontal important entre les dents antérieure (overjet)), la croissance mandibulaire est un élément important et essentiel pour permettre de corriger une telle malocclusion. L’absence de croissance peut signifier qu’une chirurgie orthognathique soit nécessaire pour équilibrer les mâchoires. Il est donc important de débuter le traitement des « classes II » au moment idéal pour bénéficier au maximum du potentiel de croissance de chaque patient. Mais cela signifie-t-il que le traitement doive être débuté le plus tôt possible lors d’une phase préliminaire (phase 1) pour tirer le maximum de la thérapie? Y a-t-il un avantage à traiter un patient ayant une classe II importante en deux phases de traitement (la première pendant la phase de dentition mixte et la seconde à l’adolescence)?

Croissance mandibulaire mandibular growth dent sagesse orthodontiste SherbrookeLa littérature orthodontique comprend des centaines d’études décrivant divers appareils visant à modifier la croissance mandibulaire au-delà de ce que serait la croissance normale. La plupart de ces appareils sont des appareils fonctionnels (aussi appelés myofonctionnels) qui positionnent la mandibule dans une position plus avancée pendant la période de croissance. Les effets à court terme de ces appareils ont été résumés dans une méta-analyse récente qui en arrive à la conclusion que :

Pour qu’une première phase de traitement orthodontique procure un réel avantage pour le patient comparée à un traitement en deux phases distinctes, il faudrait:

Or, il semble que le premier point soit possible, mais que les gains obtenus lors d’une première phase de traitement d’une malocclusion de type classe II ne soient que temporaires et ne procurent aucun réel avantage par rapport à un traitement en deux phases distinctes.

Croissance stimulation appareil fonctionnel vs normal Proffitt De Clerck orthodontie Lemay

En 1995, Gianelly a conclu que 90% de tous les problèmes orthodontiques pouvaient être traités avec une seule phase de traitement sans avoir recours à une première phase, mais que 10% des patients qui présentaient des occlusions croisées causant des déplacements fonctionnels de la mandibule et certaines sortes de malocclusions de type Classe III pouvaient bénéficier d’une intervention immédiate pour corriger le problème.(5)

Il serait bon cependant de préciser que dans certains cas sévères, un avantage psychologique réel peut être obtenu par une intervention précoce, mais pour la croissance et le résultat final, les études prouvent hors de tout doute qu’on ne peut stimuler la croissance mandibulaire au-delà du potentiel de croissance inhérent à chaque personne.

En résumé…

Que dit la littérature orthodontique?

La conclusion des études scientifiques orthodontiquesIl y a plusieurs études en orthodontie qui ont démontré qu’on ne peut différencier, rendu à l’adolescence, les patients de classe II qui ont eu une première phase de traitement en bas âge (traitement préliminaire) et ceux qui ont eu une seule phase de traitement plus tard. Les résultats orthodontiques et d’occlusion étaient similaires et la conclusion était qu’il n’était pas indiqué de faire une première phase de traitement.

Qu’en pensent les orthodontistes?

Une autre étude a comparé la perception des orthodontistes concernant l’impact d’une première phase de traitement orthodontique faite en dentition mixte sur le besoin d’avoir recours à une seconde phase de traitement par la suite pour des cas de classe II (rétrognathie mandibulaire). Les orthodontistes ne savaient pas quelle modalité de traitement avait été faite sur les sujets qu’ils évaluaient (une seule phase ou deux phases de traitement).

Ils ont conclu qu’ils ne considéraient pas une première phase de traitement comme pouvant prévenir le besoin d’avoir recours à une seconde phase de traitement et qu’une première phase de traitement n’offrait aucun avantage réel en ce qui a trait au besoin d’avoir recours à des extractions ou des corrections squelettiques lors de la seconde phase. Les traitements précoces peuvent cependant diminuer la difficulté et la priorité de la phase 2.(6)

Quand doit-on attendre la fin de la croissance pour intervenir?

➡ Pour en savoir plus sur la fin de croissance des mâchoires et l’impact que cela peut avoir sur les traitements d’orthodontie et de chirurgie.

 

Sévère classe III squelettique nécessitant une chirurgie aux mâchoires.

Devant la gravité ou sévérité de cette malocclusion de classe III déjà présente à l’adolescence et, étant donné qu’il est déterminé dès ce moment qu’une chirurgie orthognathique sera nécessaire corriger le déséquilibre des mâchoires, il était préférable d’attendre la fin de la croissance pour intervenir avec une approche « ortho-chirurgie » et ainsi éviter que la croissance restante cause une récidive après le traitement d’orthodontie.

Les études scientifiques vs la réalité clinique

De nos jours, les cliniciens peuvent de plus en plus se trouver à évaluer les résultats de traitement en termes statistiques et ils essaient d’interpréter ce que ces résultats signifient en termes de soins appropriés aux patients. Il y a deux choses essentielles qu’un clinicien doit savoir quand les résultats de traitement avec des approches de traitement alternatives sont présentées :

1- Identifier le niveau d’importance clinique

Lorsque deux modalités de traitement sont comparées pour savoir laquelle est la plus efficace, le premier élément clé est de savoir si une différence statistiquement significative dans les résultats du traitement est cliniquement significative. Autrement dit, ce n’est pas parce que les statistiques d’une étude concluent qu’une méthode es plus efficace que cela sera significatif cliniquement lors du traitement. Un clinicien ne doit considérer changer ou modifier ses méthodes de traitement seulement si la différence est cliniquement significative.

Une excellente illustration de ce point s’applique dans l’évaluation de la modification de la croissance, en particulier avec les appareils qui visent à augmenter l’augmentation de la croissance de la mâchoire comme les appareils fonctionnels. Il est maintenant largement admis que ces appareils peuvent produire une accélération de la croissance mandibulaire. Mais est-ce que cela signifie que le patient aura finalement une mandibule plus grande?

Il y a une répartition 50-50 entre les nombreuses études sur cette question qui concluent oui ou non. Il faut cependant réaliser que les deux camps rapportent une augmentation possible de seulement 1-2 mm de longueur mandibulaire par rapport à ce qu’elle aurait été sans aucun traitement. Est-ce statistiquement significatif? Peut-être. Est-ce cliniquement significatif? Presque certainement pas. Par conséquent, si l’on désire corriger une relation squelettique de classe 2 (rétrognathie mandibulaire) une bonne méthode de traitement devrait inclure aussi une autre modalité de traitement comme une diminution de la croissance maxillaire et un mouvement compensatoire des dents inférieures (camouflage orthodontique) si nous sommes en mesure d’augmenter la projection de la mandibule en moyenne de seulement 1 ou 2 mm.7

Une autre illustration de l’importance de distinguer la signification statistique de la signification clinique peut être observée dans le rapport récent de l’AJODO (American Journal of Orthodontics and Dentofacial Orthopedics) selon lequel le traitement précoce (préadolescent) des classes 2 réduit le risque de blessure aux incisives maxillaires qui sont protrusives.8 Cette constatation a été rapportée dans l’un des premiers essais cliniques publiés sur le traitement préadolescent versus adolescent de classe 2 et un article de suivi de la même étude a souligné que la lésion typique des incisives était seulement un écaillage de l’émail incisif, avec une fracture évidente d’une couronne rarement observée.9 Ainsi, l’effet était statistiquement significatif mais probablement pas cliniquement significatif. Le document récent, étonnamment, n’a pas tenu compte de l’ampleur du préjudice ou des dommages aux dents  lors de la déclaration des résultats et il est par conséquent trompeur à cause de cette omission. Dans cet exemple, le clinicien qui se penchera uniquement sur les résultats statistiques surestimera l’importance clinique du résultat et peut avoir tendance à vouloir modifier sa méthode de traitement, ce qui ne serait pas justifié.

2- Comprendre la variabilité de la réponse clinique

Le second point clé que les cliniciens doivent savoir lors de l’évaluation des résultats statistiques est important parce qu’ils doivent être en mesure d’appliquer rationnellement les résultats statistiques à des patients individuels dans leur pratique.

Avec les statistique, nous avons tendance à nous concentrer sur la médiane et à penser que les réponses sont normalement distribuées, ce qui n’est pas le cas. Est-ce que le patient individuel aura le résultat du patient médian des statistiques? Pas nécessairement. Il faut aussi évaluer la variabilité au sein du groupe étudié. Plus cette variabilité est grande, moins il est probable que le patient traité obtiendra des résultats comme le groupe médian. Autrement dit, nous regardons des statistiques pour évaluer la meilleure façon de traiter les patients mais ce ne sont pas tous les patients qui répondront ou réagiront comme la majorité des cas d’une étude statistique (la médiane)  car il y a toujours une certaine variabilité des réponses dans un groupe de patients. Il est toujours vrai que certains patients répondent à un traitement mieux que d’autres. Comprendre la variabilité dans la réponse du patient à un traitement est au cœur de la décision d’adopter une nouvelle procédure clinique.7

  Dernière mise-à-jour : 2016-12-03 à 22:48:22 © Jules E. Lemay, www.ortholemay.com


Références :

1- Vaid NR, Doshi VM, Vandekar MJ. Class II treatment with func- tional appliances: a meta-analysis of short-term treatment effects. Semin Orthod 2014;20:324-38.

2- Proffit WR, Fields HW Jr, Sarver DM. Contemporary orthodontics. 5th ed. Philadelphia: Elsevier; 2013.

3- Thiruvenkatachari B, Harrison JE, Worthington HV, O’Brien KD. Orthodontic treatment for prominent upper front teeth (Class II malocclusion) in children. Cochrane Database Syst Rev 2013; (11):CD003452.

4- Badri Thiruvenkatachari, Jayne Harrison,  Helen Worthington,  and Kevin O’Briend, Early orthodontic treatment for Class II malocclusion reduces the chance of incisal trauma: Results of a Cochrane systematic review. Am J Orthod Dentofacia Orthop 2015;148:47-59

5- Giannelly, AA , One-phase versus two-phase treatment –American Journal of Orthodontics and Dentofacial Orthopedics November 1995 Volume 108, Issue 5, Pages 556–559

6-  J Dent Res. 1999 Nov;78(11):1745-53. King et al. Orthodontists’ perceptions of the impact of phase 1 treatment for Class II malocclusion on phase 2

7- INTERPRETING DATA FOR TREATMENT OUTCOMES: CLINICIANS AS CRITICAL CONSUMERS BY WILLIAM R. PROFFIT 2016-03 Think Pieces from the Professors – the latest in contemporary & evidence-based orthodontics
http://www.toportho.org

8- Thiruvenkatachari B, Harrison J, Worthington H, O’Brien K. Early orthodontic treatment for Class II malocclusion reduces the changes of incisal trauma: results of a Cochrane systematic review. Am J Orthod Dentofac Orthop 2015; 148:47-59.

9- Tulloch JFC, Phillips C, Proffit WR.  The benefit of early treatment: progress report of a two-phase randomized clinical trial.  Am J Orthod Dentofac Orthop 113:62-72, 1998.

 

  Dernière mise-à-jour : 2016-08-05 à 23:33:28 © Jules E. Lemay, www.ortholemay.com

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